Indications :
·
Ischémie aigue
des membres inférieurs
Pour lever une ischémie aiguë des
membres inférieurs, le traitement médical (héparine et vaso-dilatateurs) ou le
traitement chirurgical (désobstruction par sonde de fogarty) ont montré leur
efficacité, mais également leurs limites. Ainsi, sont apparues les techniques endovasculaires
telles la thrombolyse médicamenteuse, la thrombolyse mécanique et la thrombo-aspiration. Ce
chapitre concernera essentiellement la thrombolyse médicamenteuse avec des
protocoles concrets et des indications dans lesquelles elle doit être réalisée.
Il ne faut en effet pas oublier que le radiologue vasculaire est responsable de
tous ces gestes thérapeutiques, et donc cautionne sa thérapeutique. Il faut par
conséquent, que l’on connaisse les indications et les contre-indications.
·
Recanalisation
de thrombose intrastent
Evaluation de l’ischémie :
Critères définis par la
Société de Chirurgie Vasculaire et la Société Internationale
de Chirurgie Cardio-Vasculaire.
Trois niveaux d’ischémie
aiguë sont définis (50) :
·
Viable (I) :
·
absence de
douleur liée à l’ischémie ;
·
pas de déficit
neurologique ;
·
circulation
capillaire cutanée satisfaisante ;
·
signal Doppler
clairement audible au niveau des artères pédieuses.
·
Menaçante
(II) :
·
douleur et/ou
;
·
déficit
neurologique incomplet ;
·
absence de
signal Doppler audible au niveau des artères pédieuses, mais persistance d’une
perméabilité veineuse ;
L’ischémie est
réversible avec un sauvetage de membre ne nécessitant pas d’amputation majeure
si l’occlusion artérielle est rapidement levée.
·
Irréversible
(III) :
·
déficit
sensitivo-moteur ;
·
absence de
flux capillaire cutané (marbrures) ;
·
absence de
signal Doppler artériel ou veineux, en distalité ;
L’amputation
est inévitable quel que soit le traitement.
Le stade III contre-indique la mise en route d’un
traitement par thrombolyse médicamenteuse. La majorité des patients qui peuvent
bénéficier de cette thérapeutique endovasculaire se trouve dans le stade II. Le
stade I fait le plus souvent appel au traitement médical à base de
vasodilatateurs et d’héparine. En fait, la conduite à tenir chez les patients
en stade III est souvent délicate compte tenu du risque d’amputation élevée et
de la pression médico-chirurgical à la réalisation de la fibrinolyse.
L’ischémie peut et doit être
analysée par un écho-doppler artériel si cela est possible. Cela permet de
connaître le lit d’aval artériel qui parfois, n’est pas opacifié par le produit
de contraste injecté pour l’artériographie compte tenu de l’absence de
collatéralité encore développée et du manque de produit de contraste arrivant à
ce niveau. Cet examen permet également de juger de la présence d’un signal
veineux distal, témoignant à ce moment là, d’une vascularisation et d’un stade
réversible. Son absence est une contre-indication à l’instauration du
traitement fibrinolytique.
L’artériographie :
Celle-ci n’est en principe pas
toujours indispensable, notamment chez le sujet jeune avec une embolie
cardiaque très probable compte tenu de ses antécédents. Cependant, il faut
reconnaître que le chirurgien vasculaire la demande quasiment systématiquement.
Elle permet de confirmer le diagnostic, de préciser le niveau et l’étendue de
l’occlusion. Toutefois, l’absence d’opacification en aval ne signe pas toujours
une ischémie irréversible.
La voie d’abord pour réaliser cette
angiographie peut être par voie fémorale, contro ou homolatérale par voie
humérale ou même proposée pour certains par voie poplitée, pour visualiser le
réseau sus-jacent. Compte tenu de notre expérience, nous recommandons la voie
humérale de prime abord avec mise en place d’un introducteur 5F . Si celle-ci est difficile ou
impossible, la voie fémorale controlatérale peut être utilisée. La voie
homolatérale en iso-courant est à éviter compte tenu du risque de transfixier
l’artère et les difficultés de compression si un hématome devait survenir.
L’artériographie sera réalisée de
façon classique en visualisant l’aorte abdominale puis les membres inférieurs.
Eviter de réaliser des séries trop importantes pour injecter le moins de
contraste possible.
Procédure de thrombolyse :
Celle-ci doit être réalisée de façon in situ en impactant
le cathéter dans le caillot. On utilisera des cathéters de taille 5F voire de taille 4F dans les petites artères. Si
la thrombose est proximale, une sonde de 120 cm de long par voie humérale est suffisante
; par contre si la thrombose est plus distale, il faudra prendre une sonde de 180 cm . Deux sondes de
thrombolyse sont disponibles : une sonde à bout distal avec deux trous latéraux
et une sonde à bout distal avec 8 trous latéraux sur 5 cm de long. L’important est
d’impacter tous les trous distaux dans le caillot et donc le choix du cathéter
se fera en fonction de la possibilité d’introduction du cathéter sur le guide
dans le segment thrombosé. Il faut démarrer par la thrombose proximale et
pousser progressivement le cathéter à l’intérieur de la thrombose si cela
s’avère nécessaire.
Il existe de nombreux autres cathéters de fibrinolyse,
pulsés ou normaux, sans qu’aucun n’ait fait preuve d’une efficacité supérieure
par rapport à l’autre.
Contre-indications générales au traitement thrombolytique :
Absolues :
·
manifestations
hémorragiques en cours ou récentes (dans les 2 mois précédents)
·
antécédent
d’accident vasculaire cérébral ;
·
tumeur du
cerveau et chirurgie intracrânienne récente ;
·
antécédent de
chirurgie intracrânienne récente ;
·
antécédent de
malformation vasculaire cérébrale ou d’hémorragie méningée d’étiologie non
précisée ;
·
altérations
constitutionnelles ou acquises, incontrôlables de l’hémostase ;
·
hypertension
artérielle sévère non contrôlée ;
·
intervention
chirurgicale datant de moins de 1 mois, ce délai pouvant être raccourci dans
les cas où la plaie opératoire est accessible à la compression ;
·
ponction
biopsie hépatique ou rénale et ponction d’une artère non accessible à la compression
depuis moins de 15 jours ;
·
mplantation
d’une prothèse en Dacron moins de 2 mois auparavant ;
·
aortographie
par voie lombaire datant de moins de 8 jours.
Relatives :
·
âge supérieur
à 70 ans,
·
hypertension
artérielle bien supportée,
·
atteinte
hépatocellulaire ou rénale sévère,
·
ulcère ne
saignant pas,
·
lithiase
urinaire,
·
tumeur pouvant
saigner,
·
massage
cardiaque ou traumatisme récent,
·
maladie
mitrale avec fibrillation auriculaire,
·
sténose
carotidienne avec risque d’embolisation,
·
endocardite
bactérienne ou maladie infectieuse sévère,
·
post partum
immédiat
Il
conviendra d’évaluer le rapport entre le risque de la thérapeutique et les bénéfices escomptés.
Le thrombolytique :
De nombreuses études ont été
réalisées avec la streptase, l’urokinase, et le rtpa. Des études comparatives
ont également été menées, notamment comparant la streptase avec l’urokinase. Ce
dernier semble plus efficace mais les doses de streptase dans ces études
étaient relativement faibles.
De nombreux protocoles existent quel
que soit le thrombolytique employé. Nous rapportons ici quelques uns des
protocoles utilisés :
·
la
streptokinase : de 5000 à 100 000 Unités/Heure.
Utilisation de fortes
doses, c’est à dire 100 000 Unités/heure pendant au moins 12 heures. Date à
laquelle, un nouveau contrôle angiographique sera réalisé.
·
l’urokinase :
de 1000 à 4000 Unités. Kilos/Heure.
Utilisation également de
fortes doses soit 4000 Unités par Kilos/heure pendant 3 heures avec contrôle
angiographique. Si la perméabilité est retrouvée mais qu’il persiste un
thrombus, la thérapeutique sera utilisée à demi dose soit 2000
Unités.Kilos/heure entre 1 à 3 heures en fonction du nombre de caillots
restants.
·
le rtpa : de
0.5 à 0,1 mg.Kilo/Heure.
Si l’on veut une
efficacité rapide, on emploiera 20 mg en bolus et 50 à 100 mg sur 2 heures.
Contrôle angiographique ensuite.
Le
choix entre ces différentes drogues est en fait essentiellement fonction de
l'heure de début de la procédure et donc des possibilités de surveillance. Une
thrombolyse débutée le matin sera préférentiellement faite à l'urokinase,
tandis que le soir, la streptase sera utilisé pour éviter entre autre les
contrôles nocturnes. Le rtpa est reservé à des fibrinolyses en cours de
procédure et contrôle 1 ou 2 heures plus tard.
Technique de fibrinolyse :
Préférer la voie humérale.
Si elle
est difficile voire
impossible , la voie fémorale
controlatérale peut être
utilisée ; la voie homolatérale
en isocourant est
à éviter en
raison du risque
de transfixion de
l’artère et des
difficultés de compression ) .
* Abord vasculaire
·
Ponction artérielle
humérale rétrograde gauche
de préférence ( technique de
seldinger ) .
·
Guide moyen
j téflonné 0.035 inch
longueur 260 cm .
·
Sonde pigtail
5f longueur
110 cm placée
dans l’aorte abdominale
·
Désilet 5F
* Bilan
·
Bilan angiographique (travelling
de face +/- incidences obliques ; 12cc à 8cc/sec).
* Geste
·
Mise en
place du cathéter
de fibrinolyse ( 5f longueur
120 ou 180 cm ; 3 trous
distaux ou 8 trous
sur 5 cm ) .
·
Impactage du
cathéter dans le
caillot à l’aide
d’un guide hydrophile
si nécessaire (tous les
trous doivent être
impactés dans le
caillot) .
·
Contrôle angiographique du
positionnement du cathéter (injection manuelle).
·
Fixation du
cathéter et du
introducteur à la peau.
·
Connexion du
cathéter à la
seringue auto pulsée
contenant le fibrinolytique .
·
Connexion du
introducteur à une seringue auto pulsée d’héparine (dose hypocoagulante).
* Contrôle :
Réguliers selon le
fibrinolytique utilisé (3h pour l’urokinase) avec réévaluation angiographique
avant la poursuite du traitement
* Protocole de fibrinolyse
- Bilan biologique avant thrombolyse :
·
Bilan rénal
·
ionogramme
sanguin
·
bilan de
coagulation à refaire après chaque période de thrombolyse
·
bilan pré-transfusionnel
- Thérapeutiques :
Per
Os ou IV :
·
Ulcar : 3
sachets par jour systématiquement
·
Aspégic :
500 mg IV (sauf si le patient est déjà sous aspirine), puis 160 mg par jour per
os
·
Nubain,
Temgesic ou morphine sur avis médical en cas de douleur de reperfusion
- Par la voie latérale de
l’introducteur
·
La voie
latérale de l’introducteur doit être purgé en permanence par un flex de sérum
glucosé ou de sérum salé.
·
Héparine en
SAP, 150 UI/10kg/h dès le début de la thrombolyse (à n’arrêter que pour le
retrait de l’introducteur 2 heures avant) à dose efficace
·
Vasodilatateur
artériel en SAP type Fonzylane 1 ampoule par heure tant que l’introducteur est
en place
- Par l’extrémité de la
sonde : le fibrinolytique
Urokinase :
·
Bolus
systématique de 100 000 UI, quelque soit le poids du malade in situ en 10
minutes dans le service de radiologie
·
Puis SAP de
4000 UI / kg / heure pendant 3 heures suivie d’un contrôle angiographique. Si
le contrôle radiologique est décalé par rapport à la fin de la SAP de
trombolytique, le remplacer par une SAP de serum glucosé ou salé.
·
Suivant
l’aspect angiographique, reprise du traitement in situ à la posologie de 2000
ou 4000 UI / KG / heure pour 3 heures supplémentaires au maximum, avec contrôle
impératif en fin de perfusion.
·
La durée de
thrombolyse sera de 6 à 8 heures au maximum.
·
A l’issue de
la thrombolyse, un nouveau contrôle angiographique sera réalisé et le patient
pourra bénéficier d’un geste complémentaire médical ou chirurgical.
Streptokinase :
On préférera son emploi
pendant la nuit avec un bolus de 100 000 UI puis une perfusion de 100 000 UI / heure pendant 12 heures au
maximum, avec contrôle angiographique au décours.
La streptokinase est
contre-indiquée en cas d’antécédent de thrombolyse par ce produit dans les 6
mois précédents ou en cas d’infection streptococcique récente.
RTPA :
0.05 à 0.1 mg / kg /
heure.
Le traitement pourra être
débuté par un bolus de 10 à 20 mg. La posologie maximale sera de 1 mg/ kg au total,
sur 8 heures maximum.
Cas particulier de la thrombose intra-stent ou de la
thrombose d’un pontage :
·
Ponction artérielle
fémorale rétrograde homolatérale si possible non transfixiante
·
Guide hydrophile
type terumo 0.035
inch 150cm :
progression douce et
progressive à travers
la thrombose.
·
Mise en
place d’un introducteur
artériel 5F
* Bilan
·
Bilan angiographique (face +/- obliques ; 24cc
à 12cc/sec).
* Geste
·
Mise en
place du cathéter
de fibrinolyse ( 5f longueur
120 ou 180 cm ; 3 trous
distaux ou 8
trous sur 5
cm ) .
·
Impactage du
cathéter dans le
caillot à l’aide
d’un guide hydrophile
si nécessaire (tous les
trous doivent être
impactés dans le
caillot) .
·
Contrôle angiographique du
positionnement du cathéter (injection manuelle).
·
Fixation du
cathéter et du
introducteur à la peau.
·
Connexion du
cathéter à la
seringue auto pulsée
contenant le fibrinolytique .
·
Connexion du
introducteur à une seringue auto pulsée d’héparine (dose hypocoagulante).
* Contrôle
·
Réguliers
(après 3h pour l’urokinase), injection manuelle dans la sonde en place
* Geste secondaire
Si levée de la thrombose
·
Stenting
d’emblée par un stent Jomed si thrombose intrastent
·
Dilatation de
l’anastomose du pontage si nécessaire
·
Contrôle
angiographique
Note :
-
parfois indications
de mise en
place d’endoprothèse(s) d’emblée
pour éviter les
dissections extensives ou
les embols périphériques ; l’angioplastie vient
secondairement .
-
dans une
recanalisation , la pose d’endoprothèse(s) est systématique.